PROCURER
(pro-ku-ré) v. a.1° Obtenir par des soins, par des efforts.
La loi qui nous oblige à procurer autant qu'il est en nous le bien général de tous les hommes [DESC., Méth. VI, 2]
Non point en flattant le peuple, mais en procurant son bien [BOSSUET, Hist. III, 3]
L'Église eut horreur de la conduite de l'évêque lthace, qui procura la mort de l'hérésiarque Priscillien [FLEURY, Mœurs des chrét. IV, 7]
Procurer que..., avec le verbe au subjonctif.
Le prince doit procurer que le peuple soit instruit de la loi de Dieu [BOSSUET, Polit. VII, III, 14]
2° Faire obtenir quelque avantage.
Sans commettre l'autorité du roi son seigneur, elle employait son crédit à procurer un peu de repos aux catholiques accablés [BOSSUET, Reine d'Anglet.]
En mauvaise part.
Pour ceux qui m'ont causé quelques désavantages, Procuré quelque perte, ou fait quelques outrages [CORN., Imit. IV, 9]
3° Simplement. faire en sorte qu'une personne ait une chose. On eut beaucoup de peine à me procurer des chevaux.
4° Se procurer, procurer à soi. Elles se sont procuré des bijoux.
Je me procurerai tous mes besoins ; et, pourvu que je les aie, je ne me soucie point que tous les autres Troglodytes soient misérables [MONTESQ., Lett. pers. X]
En mauvaise part.
Je me procure un mal pour en éviter mille [CORN., la Pl. Roy. I, 4]
Je serais ravie de savoir.... par quels chemins vous avez été conduit à ce qui vous paraissait un bien ; car ce n'est jamais que sous ce nom que nous nous procurons des maux [SÉV., à du Plessis, 20 août 1690]
5° Être la cause de, en parlant de choses. Cette potion lui a procuré du sommeil. Cette affaire lui a procuré des désagréments.
Si j'estime en quelque chose les deux lettres que vous avez louées, c'est pour m'avoir procuré l'honneur d'en recevoir une des vôtres [VOIT., Lett. 47]
Jamais Epaminondas n'avait déployé plus de talents que dans cette circonstance [à Mantinée] ; il suivit, dans son ordre de bataille, les principes qui lui avaient procuré la victoire de Leuctres [BARTHÉL., Anach. ch. 13]
HISTORIQUE
- XIIIe s.
Quelconques biens que, Dieu procurant, vous poés avoir par manieres raisonnables au temps à venir [TAILLIAR, Recueil, p. 501]
Tenir e fermement garder, e procurer à tenir e à garder quant que le dit Hues chevalier fera [, Bibl. des Chartes, 4e série, t. IV, p. 79]
....procurer, ....Que bonne pes [paix] entre eus eüst [, la Rose, 9039]
- XIVe s.
Par foi, ce dit Turquant, je viens de procurer Comment vous et vos biens porrez très bien garder ; Je vien du roi Henry pour vous parlementer [, Guesclin. 9491]
Puis le fist le roi mener en son propre palais et ses gens, et moult le fit noblement procurer de diverses manieres de viandes [, Chr. de St-Denis, t. II, f° 28, dans LACURNE]
- XVe s.
Tant alla et tant procura la bonne dame entre ces seigneurs avec l'aide et le conseil d'un gentil chevalier et sage, que.... [FROISS., I, I, 143]
Ce fort vice et peché d'orgueil qui procure hayne envers toute personne [COMM., I, 9]
Aujourd'hui li tems est felons ; Car par mentir chascun procure Or et argent ; c'est chose dure [E. DESCH., Poésies mss. f° 245]
- XVIe s.
Ma vieillesse ne requeroyt doresnavant que repous, et toute ma vie n'ay rien tant procuré que paix [RAB., Garg. I, 28]
Il ne se peut faire qu'une ame fidele, estant touchée de l'horreur du jugement de Dieu, ne procure à se punir soy mesme [CALV., Inst. 472]
Les chrestiens doivent procurer cela, de plustost tousjours quitter leur droit, que de commencer procez [ID., ib. 1208]
Ses ennemis furent bien aises de ces propos, estimans que la commune incontinent jugeroit, que luy mesme se seroit procuré les maulx qu'ils pretendoient luy faire souffrir [AMYOT, Marcel. 31]
ÉTYMOLOGIE
- Berry, précurer ; provenç. et espagn. procurar ; ital. procurare ; du lat. procurare ; de pro, pour, et curare, avoir soin (voy. CURIEUX).
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
PROCURER. Ajoutez : 6° Procurer de, avec l'infinitif, faire en sorte de.
Nous nous marions, et procurons d'avoir des enfants [MALH., Lexique, éd. L. Lalanne.]
Il procura, par l'intercession de Madame, d'avoir sa grâce [ID., ib.]
Émile Littré's Dictionnaire de la langue française © 1872-1877