RECOIN
(re-koin) s. m.1° Coin plus caché, moins en vue.
Me tapissant au recoin d'une porte [RÉGNIER, Sat. XII]
Il n'est coin et recoin que je n'aie tenté [ID., ib. XI]
Il descendit dans les villages qui étaient épars çà et là dans le recoin des vallons [D'ABLANCOURT, Retraite des dix mille, IV, 1]
Je l'aperçus hier, sans en être aperçu, Dans un recoin du bois où nul ne se retire [MOL., Dép. am. II, 7]
Leur appétit fougueux, par l'objet excité, Parcourt tous les recoins d'un monstrueux pâté [BOILEAU, Lutr. v.]
Ils rôdent dans les maisons, ils visitent tous les recoins, ils se disputent sur le partage à faire [A. DUVAL, les Héritiers, SC. 8]
Je viens d'envoyer cent cinquante grenadiers pour visiter toutes les cavités, tous les recoins de ces rochers [ID., Édouard en Écosse, II, 13]
Fig.Ces notions privilégiées qu'il appréhende de sonder, et qui sont placées dans un recoin de sa cervelle [DIDEROT, Pens. philos. n° 34]
2° Par extension, lieu retiré.
L'homme, sans lumière, abandonné à lui-même et comme égaré dans ce recoin de l'univers [PASC., Pens. XI, 8, éd. HAVET.]
Il ne s'y trouva [aux Tuileries, pour la duchesse du Maine] que deux grandes pièces qui furent partagées à ses femmes ; j'eus, selon ma destinée, un petit recoin sans jour et sans feu que celui d'une antichambre commune [STAAL, Mém. t. I, p. 289]
Lorsqu'on revient sur soi, et qu'on compare les talents qu'on a reçus avec ceux d'un Leibnitz, on est tenté de jeter loin les livres, et d'aller mourir tranquille au fond de quelque recoin ignoré [DIDEROT, Opin. des anc. philos. Leibnitzianisme.]
Le pauvre Rodio, depuis pris dans un recoin de la Calabre, fut jugé par une commission militaire [P. L. COUR., Lett. I, p. 282]
3° Fig. Ce qu'il y a de plus caché.
Il poursuit un raisonnement jusque dans les derniers recoins de la logique [MOL., Mal. imag. II, 6]
Non-seulement ces sciences ont des recoins et des renfoncements fort peu utiles.. [, Logique de Port-Royal, p. 2]
Il faut qu'il me suive dans tous les recoins de ma vie [J. J. ROUSS., Conf. II]
Les recoins du cœur, de la conscience, ce qu'il y a de plus caché dans le cœur, dans la conscience.
HISTORIQUE
- XVIe s.
Dalangane attaqua effrontement cette infanterie, et Montal venant par un recoin pour la soutenir.... [D'AUB., Hist. II, 168]
Dans ce recoin ce courageux tint autant de jours qu'il faloit pour.... [ID., ib. III, 164]
ÉTYMOLOGIE
- Renforcement de coin par la particule re.
Émile Littré's Dictionnaire de la langue française © 1872-1877