HONNÊTETÉ
(o-nê-te-té) s. f.1° Conformité à ce qui est honnête, bienséant. Blesser les règles de l'honnêteté.
Accorde à ma prière Ce que l'honnêteté doit à ta prisonnière [DU RYER, Scévole, I, 6]
2° Conformité à l'honneur et à la probité. L'honnêteté de son âme, de sa conduite, de ses principes.
Et pour venir à bout de mon honnêteté, Il met tout en usage et crime et piété [ROTROU, Venceslas, II, 1]
C'est après avoir connu l'honnêteté de ma flamme qu'elle m'a aidé à persuader votre fille de me donner sa foi et de recevoir la mienne [MOL., Avare, III, 5]
Ensemble des qualités qui font l'honnête homme, l'homme accompli selon le monde.
Il n'y a que la religion chrétienne qui rende l'homme aimable et heureux tout ensemble ; dans l'honnêteté, on ne peut être aimable et heureux tout ensemble [PASCAL, Pens. XXV, 39, édit. HAVET.]
3° Pudeur, modestie, chasteté.
L'honnêteté d'une femme n'est pas dans les grimaces [MOL., Crit. 3]
Le latin dans les mots brave l'honnêteté, Mais le lecteur français veut être respecté [BOILEAU, Art p. II]
Ce serait acheter trop cher le plaisir de rire soi-même ou de faire rire les autres, que de l'acheter aux dépens de l'honnêteté [ROLLIN, Hist. anc. Œuv. t. IV, p. 139, dans POUGENS]
4° Observation des bienséances de la société. Il n'a pas eu l'honnêteté d'aller le voir.
Son sexe et l'hospitalité De la part de ces coqs, peuple à l'amour porté, Lui faisaient espérer beaucoup d'honnêteté [LA FONT., Fabl. X, 8]
Briard fut choisi pour l'ambassade de Turin, et, quand l'affaire fut faite, le roi en dit un mot d'honnêteté à M. le Prince [SAINT-SIMON, 44, 4]
Acte, parole d'honnêteté.
Les honnêtetés qu'il veut bien que vous me disiez de sa part, me font croire, ou qu'il est extrêmement civil, ou qu'il a assez bonne opinion de moi [VOIT., Lett. 125]
Pour faire une honnêteté au premier président [SÉV., 574]
Je vous remercie des honnêtetés que vous avez faites à la Brosse [ID., 50]
Le P. Roslet, à qui je vous prie de faire bien des honnêtetés de ma part [BOSSUET, Lett. quiét. 224]
Il me laissa souper au bout de la table, loin du feu, sans me faire la moindre honnêteté [J. J. ROUSS., Confess. IX]
5° Manière d'agir obligeante. L'honnêteté de son procédé.
6° Cadeau qu'on fait par reconnaissance. Cela méritait bien une honnêteté.
REMARQUE
- Pour les deux nn à honnêteté, voy. HONNÊTE.
HISTORIQUE
- Xe s.
Por o [pour cela] s'furet morte [elle serait morte] à grand honestet [, Eulalie]
- XIIe s.
Li priur del munt deu, huem [homme] de grant honesté, Arcevesque et evesque e priur e abé [, Th. le mart. 106]
- XIIIe s.
Cou [ce] fist li empereres pour plus grant honesté, Dont li nostre François fussent plus honoré [, Ch. d'Ant. II, 261]
Tulles [Cicéron] dit : cil est honestes qui n'a nulle laide teche ; car honestés n'est autre chose que honor estable et permanans [BRUN. LATINI, Trésor, p. 338]
- XIVe s.
Li evesque fu cians [céans] dont vous oy avez, Au bon duc de Berry montra moult d'onnestez [, Guesclin. variantes des vers 20783 à 20844]
- XVIe s.
Si n'estoit point ce peintre Polygnotus homme mechanique ny mercenaire, qui peignist ce portique pour gaigner de l'argent, ains feit liberalement ceste honesteté à la chose publique [AMYOT, Cimon, 8]
Lucullus avoit des son jeune aage appris par honesteté les lettres humaines [ID., Lucull. 2]
L'honnesteté de ses mœurs [MONT., III, 520]
ÉTYMOLOGIE
- Provenç. honestat, honestetat ; anc. espagn. honestad, espagn. mod. honestitad ; ital. onestà ; du latin honestatem, de honestus, honnête. Honesté représente honestatem, honesteté représente honestitatem (QUICHERAT, Addenda).
Émile Littré's Dictionnaire de la langue française © 1872-1877