REFOULER
(re-fou-lé) v. a.1° Fouler de nouveau. Refouler une étoffe.
2° Terme d'artillerie. Enfoncer et presser dans le fond du canon la charge qui doit chasser le projectile.
3° Terme de marine. Repousser avec une broche de fer une cheville qu'on veut chasser du trou qu'elle occupe.
4° Refouler un métal, le battre à chaud pour en rassembler les molécules. Terme de maréchal. Refouler l'éponge, frapper à l'extrémité d'une des branches du fer à cheval pour le renforcer, ou pour lui donner la forme carrée. Terme de serrurerie. Donner du renflement à l'extrémité d'un morceau de fer en le frappant à chaud et debout.
5° Résister à l'effort du courant d'un fleuve ou de la marée.
Après avoir vogué plus d'une minute sans pouvoir refouler la marée [LAPÉROUSE, Voy. t. II, p. 171]
Ils représentèrent que ce courant qui nous paraissait si fort, ils l'avaient refoulé plusieurs fois avec leur canot [ID., ib. t. II, p. 147]
6° Faire refluer en arrière. Cet obstacle refoula le torrent. La masse des fuyards fut refoulée par la cavalerie. Terme de vénerie. Faire retourner les chiens sur leurs pas.
7° V. n. Refluer, revenir en arrière.
Les passages de l'Asie étant mieux gardés, tout refoulait vers l'Europe [MONTESQ., Rom. 19]
M. Bernoulli a fort bien observé que, dans la rupture des corps élastiques, une partie des fibres s'allonge, tandis que l'autre partie se raccourcit, pour ainsi dire, en refoulant sur elle-même [BUFF., Hist. nat. Introd. Œuv. t. VIII, p. 253]
De nos jours, Iphicrate, à la tête des troupes athéniennes, entreprit de lui fermer [à un cours d'eau] toute issue, afin que, ces eaux refoulant dans le lac et ensuite dans la ville qu'il assiégeait vainement, elle fût obligée de se rendre à discrétion [BARTHÉL., Anach. ch. 52]
Environ l'an sept cent de l'ère chrétienne, une nouvelle religion parut en Orient avec Mahomet ; et le christianisme refoula dans l'Europe, pour s'y concentrer [RAYNAL, Hist. phil. XIX, 9]
On dit que la mer, la marée refoule, pour dire qu'elle descend. On dit qu'une cheville refoule lorsqu'elle n'entre pas.
HISTORIQUE
- XIIIe s.
Nus frepier ne puet ne ne doit refouler, ne achater ne vendre drap refoulé, par son serement [, Liv. des mét. 196]
- XIVe s.
Pour ce que ses chevaux estoient refoulez [fatigués] [DU CANGE, recredere.]
- XVIe s.
.... de sorte qu'en me donnant tant soit peu, ils [des amis] feroient refouler le bien chez moy à foison [LA BOÉTIE, 119]
La chaussée que nous avons laissé commencer, aiant fait refouler la riviere d'Oise dedans la ville de la Fere.... [D'AUB., Hist. III, 377]
Après refouloit on le marc, duquel tiroient un second vin pour le mesnage [O. DE SERRES, 232]
[Si la boiterie du bœuf est causée] par nerf refoulé, les jambes seront bassinées avec huile et sel [ID., 978]
ÉTYMOLOGIE
- Re..., et fouler ; wallon, rifolé.
Émile Littré's Dictionnaire de la langue française © 1872-1877
refouler
REFOULER, v. act. REFOULOIR, s. m. [Re-fou-lé, loar: 1re e muet; 3e é fer. au 1er] Refouler, c'est 1°. fouler de nouveau. "Refouler une étofe. = 2°. En terme de Marine, refouler la marée, aler contre le cours de la marée. Et neutralement: la marée refoule, descend. = 3°. En termes d'Artillerie, refouler, bourrer une pièce de canon avec le refouloir, qui est un bâton garni à l'une de ses extrémités d'un grôs bouton aplati, qui sert à bourrer les pièces de canon.
Jean-François Féraud's Dictionaire critique de la langue française © 1787-1788