TINTER1
(tin-té) v. a.1° Faire sonner lentement une cloche, en sorte que le battant ne frappe que d'un côté. Tinter la grosse cloche.
Absolument. On tinte à la paroisse. On tinte un office pour avertir qu'il est au moment de commencer.
Que cette messe serait tintée par trente-trois coups distincts et séparés [HARDUIN, Mém. sur l'Artois, p. 200, dans POUGENS]
2° V. n. Sonner lentement. La cloche de la chapelle tinte. Voilà le sermon qui tinte, la messe qui tinte, la cloche tinte pour avertir que le sermon, la messe va commencer.
3° Il se dit d'autres petits sons comparés à ceux d'une clochette.
M. de Segrais écrivit au nom de l'Académie de Caen, pour inviter l'Académie française à décider s'il fallait dire bo-n à monter, bo-n à descendre, ou ne point faire tinter la consonne finale de bon [D'OLIVET, Pros. franç. III, 6]
Pauvres fous, battons la campagne ; Que nos grelots tintent soudain [BÉRANG., Couplet.]
Ah ! je voudrais qu'on entendît Tinter sur la vitre sonore Le grésil léger qui bondit [ID., Maud. print.]
Les troupeaux dont la cloche Comme un appel lointain tintait de roche en roche [LAMART., Joc. VIII, 89]
Faire tinter un verre, lui faire rendre un son en le frappant comme une cloche.
4° Frapper une clochette pour appeler.
Mes divins anges, quand vous voudrez des commentaires cornéliens, vous n'avez qu'à tinter [VOLT., Lett. d'Argental, 5 sept. 1761]
5° Se prolonger comme un tintement.
La même voix tintait longtemps dans mes oreilles, Et, sortant de mon cœur, m'entretenait tout bas [LAMART., Destinées de la poésie.]
6° L'oreille lui tinte, il entend, dans son oreille, sans qu'il y ait aucun son extérieur, un bruit pareil à celui d'une petite cloche.
Il n'a pas un moment de repos en sa vie ; Si l'oreille lui tinte, ô dieux ! tout est perdu [LA FONT., Coupe.]
On dit aussi : les oreilles lui tintent.
Les yeux s'éteignirent, les oreilles tintèrent, l'esprit se perdit, les défaillances se succédèrent, et nous crûmes qu'il touchait à la fin de sa vie et de ses douleurs [DIDER., Lett. à Mlle Voland, 1er oct. 1768]
Faire tinter les oreilles de quelqu'un, lui répéter très souvent une chose.
Que, de bouche en bouche, on fasse tinter les oreilles du chancelier ; qu'on ne lui donne ni repos ni trêve ; qu'on lui crie toujours : Calas, Calas ! [VOLT., Lett. d'Argental, 7 août 1762]
Fig. Les oreilles doivent vous avoir bien tinté, se dit pour faire entendre à une personne qu'on a beaucoup parlé d'elle en son absence.
Si les oreilles vous tintent, ne croyez pas que ce soit une vapeur, c'est que nous parlons fort de vous [SÉV., 21 août 1677]
Fig. et familièrement. Le cerveau lui tinte, il a la tête fêlée, dérangée.
D'assez bon vin chaque jour une pinte Rajustera ton cerveau qui te tinte [VOLT., Pauv. diable.]
HISTORIQUE
- XIIe s.
E vit tut entur lui les eveques ester ; Uns suls d'els pur le rei ne volt un mot tinter [, Th. le mart. 41]
- XIIIe s.
Nul ne set si bien distinter, Qu'il en ose ung seul mot tinter [, la Rose, 11100]
- XVIe s.
Mon Dieu, quel plaisir c'estoit, Quand Pelotin se grattoit, Faisant tinter sa sonnette Avec sa teste folette ! [DU BELLAY, VII, 38, verso]
Ils sont du tout chassés par le son des clochetes qu'on y tinte [O. DE SERRES, 485]
ÉTYMOLOGIE
- Lat. tinnitare, fréquentatif de tinnire, résonner. L'ancienne langue avait une autre forme, tentir, qui est restée dans le composé retentir.
TINTER2
(tin-té) v. a.Terme de marine. Appuyer, assujétir avec des tins. Tinter la quille d'un navire.
Émile Littré's Dictionnaire de la langue française © 1872-1877