CAUSER1
(kô-zé) v. a.Être cause, occasionner.
Qu'il a fait un larcin de rôt ou de fromage, Égratigné quelqu'un, causé quelque dommage [LA FONT., Fabl. III, 18]
Quel que soit le plaisir que cause la vengeance, C'est l'acheter trop cher.... [ID., ib. IV, 13]
Je m'en tais, et ne veux leur causer nul ennui [ID., ib. IV, 8]
Cela causa leur malheur [ID., ib. IV, 6]
Le trop superbe équipage Peut souvent en un passage Causer du retardement [ID., ib. IV, 6]
Vous savez ses malheurs, vous les avez causés [RAC., Iphig. III, 4]
Je veux l'attendre ici ; les chagrins qu'il me cause M'occuperont assez tout le temps qu'il repose [ID., Brit. I, 1]
Si Dieu n'a rien en lui-même par où il puisse causer en nous les volontés libres [BOSSUET, Libr. arb. 3]
HISTORIQUE
- XIVe s.
...en la maniere que aucuns le disoient et se causoient [se fondaient sur] de ce que la fin est melleur que n'est la generacion de la fin [ORESME, Eth. 220]
- XVe s.
Nostre roy est le seigneur du monde qui le moins a causé [été cause] de user de ce mot de dire : J'ai privilege de lever sur mes subgectz ce que il me plaist [COMM., V, 18]
- XVIe s.
Elle monstre que toutes ces choses sont causées [fondées] en Jesus Christ, comme en estant le fondement [CALV., Instit. 1066]
Au moyen de quoi, lui fut facile de causer [motiver] son voyage là dessus [B. DESPER., Contes, V]
Il mourut d'une apoplexie que ce coup luy causa [MONT., I, 74]
Cela m'a causé me restraindre de trop grande liberalité [B. DE PALISSY, 11]
Donnant à entendre que.... : langaige causé [développé comme cause et motif] et contenu en ladicte ordonnance [CARLOIX, VIII, 3]
ÉTYMOLOGIE
- Cause ; espagn. cauzar ; ital. causare.
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
1. CAUSER. Ajoutez : 2° Donner pour motif (sens inusité).
Cela insinue beaucoup en causant comme petit-fils de Sa Majesté [en donnant pour motif de la décision le titre de petit-fils] [SAINT-SIMON, t. VIII, p. 194, éd. Chéruel.]
CAUSER2
(kô-zé) v. n.1° S'entretenir familièrement. Ils causent ensemble. De quoi causent-ils ? Nous causerons de cette affaire.
Je veux me vanter d'être toute l'après-midi dans cette prairie, causant avec nos vaches et nos moutons [SÉV., Lett. 384]
Voilà la chose du monde la plus heureuse pour lui ; vous savez tout cela, mais on cause [c'est-à-dire je vous écris cela pour causer avec vous] [ID., 592]
Pour mon fils, M. le maréchal n'a pas voulu le laisser venir ; il est le seul avec qui il cause de toute chose [ID., ib.]
Le duc d'Orléans régent daigna un jour causer avec moi au bal de l'Opéra ; il me fit un grand éloge de Rabelais [VOLT., Lett. Mme du Deffant, 13 oct. 1759]
Familièrement. Causer de choses et d'autres, s'entretenir sans propos déterminé.
Fig. Causer de la pluie et du beau temps, parler de riens, de choses de peu d'importance.
Elliptiquement. Causer littérature, voyages, etc. causer de littérature, de voyages.
Familièrement. Ah çà ! causons un peu, expliquons-nous, entendons-nous. Passivement et impersonnellement, dans le parler familier, c'est assez causé, ou, simplement, assez causé, ne parlons plus, agissons, et aussi, taisez-vous, brisons-là.
2° Familièrement, tenir des propos, parler avec légèreté et indiscrétion, ou avec malignité.
Le monde, chère Agnès, est une étrange chose ! Voyez la médisance, et comme chacun cause ! [MOL., Éc. des fem. II, 6]
Je ne m'étonne point si parfois on en cause [ID., Prol. d'Amph.]
Voilà ce que c'est que d'avoir causé ; vous n'en tâterez plus, et je vous laisse sur la bonne bouche [ID., G. Dandin, II, 7]
3° V. n.Terme de fauconnerie. Se dit du cri des perroquets et des pies.
HISTORIQUE
- XIIIe s.
Par poi Hersent n'enrage d'ire Por Ysengrin, qui si la chose [gronde] [, Ren. 725]
Moult de sa gent parler n'en osent, Mais par derriere moult l'en chosent [blâment], Fabliaux [BARBAZ., I, 160]
- XVe s.
Je vous ait dit et causé [expliqué] toutes les avenues de Jean Bar, de Jean Pict.... [FROISS., II, II, 239]
Envie qui accuse et cause [blâme] Maintes personnes tout à tort [, Myst. Resurr. de N. S]
L'homme songeart il [le vin] fait causer et rire [BASSELIN, XXXVII]
Si voulez que je cause et preche, Et parle latin proprement, Tenez ma bouche toujours freche, De bon vin l'arrosant souvent [ID., LVIII]
- XVIe s.
Ce fut un commandement nu et simple, où l'homme n'eut rien à connoistre et à causer [demander raison] [MONT., II, 208]
ÉTYMOLOGIE
- Provenç. chausar, causciar, reprocher, disputer ; espagn. causar, faire un procès ; du latin causari, faire un procès, d'où disputer, reprocher, et simplement, causer. Diez et d'autres étymologistes font intervenir l'ancien haut allemand chôzôn, allemand moderne kosen ; mais le latin suffit à la forme et au sens du mot roman.
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
2. CAUSER. - REM. Ajoutez : Corneille a dit me causer pour causer avec moi : Lysis m'aborde, et tu veux me causer, Lexique, éd. Marty-Laveaux.
Émile Littré's Dictionnaire de la langue française © 1872-1877
causer
Causer, neutr. acut. Est caqueter beaucoup, et de frivoles, Nugas referre, multiloquio aures onerare, Ce qui vient de ce que cause signifiant plaid et proces, et causeur une partie en proces, les parties avec foison de faits, moyens et alleguez impertinens et tedieux, disent de bouche et par escrit pesle-mesle, et à tort et à travers tout ce qui leur vient en la pensée, jusques à accabler les Juges, et à l'audience et au bureau. Il ne fait que causer, Narrationum farraginem nectit, deblaterat. Et quand il est repeté, comme, Il cause, cause, est significatif de parler tumultuaire et sans jugement, Verba temere profundit, Stulta loquacitate agitur, voyez Causeur.
causer
Causer un endormissement, Torporem, obducere, vel inducere.
C'est une des choses qui cause crainte, Est inter causas timoris, Inter ea quae timorem iniiciunt.
Jean Nicot's Thresor de la langue française © 1606
causer
CAUSER, v. n. S'entretenir familièrement avec quelqu'un: Ils caûsent volontiers ensemble: il y a du plaisir à causer avec lui. — Parler trop et inconsidérèment. "Il aime à causer. Ne lui dites pas votre secret, infailliblement il caûserait. = Parler avec malignité, blâmer, critiquer. Votre conduite est indiscrète, déjà partout on en caûse.
Rem. Causer, quand il est seul et sans régime, se prend en mauvaise part; c'est dire des riens, des balivernes. "Cet homme ne fait que causer. "C'est-là causer pour causer. "C'est proprement causer que tout ceci; car c'est une chôse passée. Sév. = On dit, proverbialement, dans ce sens, causer comme une pie (quelques-uns ajoutent, borgne) il caûseroit les piés dans l'eau. On caûse volontiers, quand on a les piés chauds. — Mais causer, se prend en bone part, quand on y joint avec ou ensemble: je caûse souvent avec lui; nous causons tous les jours ensemble.
Causer, régit quelquefois la prép. de des chôses: causer de chôses et aûtres; s'entretenir familièrement de diverses chôses de peu d'importance.
Jean-François Féraud's Dictionaire critique de la langue française © 1787-1788