aliéner
(Mot repris de aliénassions)aliéner
v.t. [ lat. alienare, de alienus, étranger ]s'aliéner
v.pr.aliéner
(aljene)verbe transitif
ALIÉNER
(a-li-é-né. La syllabe én prend l'accent grave quand la syllabe qui suit est muette, il aliène, excepté au futur et au conditionnel, il aliénera) v. a.HISTORIQUE
- XIIIe s. Bourgois ne puet pas aliener la chose de la commune sanz le commandement le roi [, Liv. de just. 47]Et se le clamant dit que.... fié ne se peut vendre ne aliener, que par l'assise des ventes ou par partie de servise.... [, Ass. de J. 63]Chascun peut le sien doner et aliener par sa volenté [, ib. I, 183]
- XIVe s. Et se leur tristece est alegée ou alienée pour l'une cause ou pour l'autre, nous n'en diron plus à present [ORESME, Eth. 289]Laquelle chose eust le pueple aliené en celui temps très perilleux [BERCHEURE, f. 38, recto.]
- XVe s. Le chevalier s'excusa et dit que l'heritage du roi d'Angleterre, il ne pouvoit vendre, donner ni aliener que il ne fust trahistre [FROISS., II, III, 10]
- XVIe s. Ils vous diront que vostre doux langage Les cœurs humains aliene et engage [ST-GEL., 32]... Et si du tout alienés vous n'estes Par nos deffauts de nous et nos requestes... [ID., 217]Il approuva seulement les donations qui ne seroient point procedées de sens aliené par quelque griefve maladie [AMYOT, Solon, 40]Ilz se partirent l'un d'avec l'autre, encore plus alienez qu'ilz n'estoient auparavant [ID., Lucul. 72]Avec puissance de vendre et aliener ce qui appartenoit à la chose publique [AMYOT, Cicéron, 14]Caesar, qui plus est, aliena fort Pompeius de luy [Cicéron] [ID., ib. 39]Et ne faut point s'estonner si ce malheureux print plaisir à souiller cette chair alienée [privée] de sentiments [YVER, p. 561]Ce qui lors fut jugé aliené [bien éloigné] des protestations qu'ils avoient faites, de ne prendre autre chose que la manutention de ladite religion [D'AUB., Hist. III, 331]Les susdits humeurs se convertissent en diverses et alienées substances, qui ne ressemblent en rien aux humeurs, mais à plusieurs choses estranges [PARÉ, V, 4]Vous ne lui deveriez pas aliener ses biens [PALSGR., p. 420]Vous avés aliené ce jeune homme de vous à tort et sans cause [ID., ib.]
ÉTYMOLOGIE
- Alienare, de alienus, de alius, autre ; provenç. alienar.
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
- ALIÉNER. - REM. J. J. Rousseau a dit : Aliéner la tête, pour rendre fou. Je ne suis ni jour ni nuit un seul instant sans souffrir, ce qui m'aliène tout à fait la tête.... Lettre à Moultou, 18 janv. 1761.
aliéner
Fig., Aliéner les affections, les coeurs, les esprits, Faire perdre la bienveillance, l'affection, l'estime. Cela lui aliéna le coeur des peuples. Il a aliéné les esprits, il s'est aliéné, il s'aliénera les esprits par ses manières hautaines. Les esprits étaient aliénés.
Aliéner l'esprit, Faire perdre l'esprit, rendre fou, faire devenir fou. Sa dernière maladie lui a aliéné l'esprit. Il vieillit.
Le participe passé ALIÉNÉ, ÉE, s'emploie comme nom et absolument pour désigner Ceux qui ont l'esprit dérangé. Un hospice pour aliénés. Un asile d'aliénés. Les progrès de l'alcoolisme augmentent considérablement le nombre des aliénés.
aliener
Aliener et estranger, Alienare, Abalienare, Distrahere.
Aliener un champ, Agrum emancipare.
S'aliener d'aucun, Se ab aliquo remouere, Ab aliquo se alienare.
Estre aliené de son entendement et hors du sens, Alienari mente.
Aliené, Alienatus.
aliéner
ALIÉNER, v. a. [Ali-éné, 3e et 4e é fer. tout bref.] 1°. Au propre, vendre: il ne se dit que des fonds et de ce qui tient lieu de fonds. 2°. Aliéner l'esprit, faire devenir fou; aliéner les afections, les coeurs, doner de l'aversion, faire perdre l'affection. "La cruauté de Néron lui aliéna l' affection de tous ses sujets.