clore
clore
v.t. [ lat. claudere, fermer ] Litt.clore
(klɔʀ)verbe transitif
le faire taire
clore
Participe passé: clos
Gérondif: closant
Indicatif présent |
---|
je clos |
tu clos |
il/elle clôt |
nous closent |
CLORE
(klo-r') v. a.Usité seulement dans les formes suivantes : je clos, tu clos, il clôt ; je clorai ; je clorais ; clos ; que je close ; clos, close.REMARQUE
- Des grammairiens se sont plaints qu'on laissât sans raison tomber en désuétude plusieurs formes du verbe clore. Pourquoi en effet ne dirait-on pas : nous closons, vous closez ; l'imparfait, je closais ; le prétérit défini, je closis, et l'imparfait du subjonctif, je closisse ? Ces formes n'ont rien de rude ni d'étrange, et il serait bon que l'usage ne les abandonnât pas.
SYNONYME
- CLORE, FERMER. Fermer, qui vient de firmare, rendre ferme, assurer, fortifier, s'est substitué peu à peu à tous les emplois de clore qui, venant de claudere, était, à l'origine, le mot propre. Aussi, malgré l'étymologie, n'y a-t-il guère de différence qu'en ce que le premier est d'un usage général, tandis que le second est d'un emploi restreint. Qu'on prenne toutes les locutions, et l'on verra que les nuances sont insaisissables. On ferme ou on clôt un jardin de murs ; le sommeil nous ferme ou nous clôt les yeux ; le président ferme ou clôt la discussion ; cette porte ne ferme pas bien ou ne clôt pas bien (pourtant on dira, avec une nuance : cette porte ferme bien, mais elle ne clôt pas ; c'est-à-dire les verrous en sont solides, mais elle laisse des jours). En un mot, fermer, prenant le sens de clore, s'est partout substitué à lui, excepté dans quelques locutions toutes faites : à huis clos, et non à huis fermé ; nuit close, et non nuit fermée ; le propriétaire de la maison est obligé de tenir le locataire clos et couvert, et non fermé (ici fermé ferait presque un contre-sens). En revanche, ce serait un autre contre-sens que de dire à quelqu'un de clore la porte, au lieu de fermer la porte, parce qu'on veut dire l'arrêter par le pêne ou par un loquet, non pas la clore. En somme, c'est l'effet naturel d'un mot impropre qui se substitue à un mot propre, d'en prendre la plupart des significations et pourtant de ne pas le chasser des locutions traditionnelles.
HISTORIQUE
- XIIe s. Sire [il] fu de Illande, une terie où mers clot [, Sax. XVII]Plus a fierté Herupe et Bretaigne et Touraine Que tous li remenanz que mers cloe et açaine [, ib. XX]De ci que il out parfait sun palais e le temple nostre seignur, e clos le mur envirun Jerusalem [, Rois, 233]
- XIIIe s. Ces haus murs et ces riches tours dont la vile estoit close [VILLEH., LXI]Lors se clostrent li nostre de lices par defors [ID., CLIII]Et si ot molt bele maison, Close de haut mur environ [, Lai du trot]Por la destrece de mort cloudrent [se fermèrent] mi œil [, Psautier, f° 106]Ançois doivent li auditeur clorre et seeler ce qui est fet et aporter en jugement [BEAUMANOIR, VI, 15]Et nous n'avons point de demain, Quar li termes vient et aprouche Que la mort nous clorra la bouche [RUTEB., 97]Li roys fist clorre tout l'ost de grans fossés [JOINV., 218]Et commanda le roy que l'en clousist nostre ost de fossés [ID., 221]Et jà parole ne fust née, Se bouche fust close tous jours [, Denier et brebis, dans JUBINAL, t. II, 264]
- XIVe s. Son sanc est ou cuer et es euls [yeux] qui sont gros, et ne les clot onques [ORESME, Eth. 23]
- XVe s. Pour eux tollir et clorre le pas de la mer [aux assiégés de Calais] [FROISS., I, I, 315]Où ils cloyoient la plus part de l'ost [COMM., I, 2]Commanderent qu'on amenast le charroy là où nous estions et que on nous cloyst, et ainsi fut fait [ID., I, 4]Avant que le roy prist Arras, la ville cloyoit contre la cité, et y avoit grans fossez et grandes murailles entre deux, ainsi la cité estoit bien close [ID., VI, 6]Je vous supplie que vous cloyez les fenestres, afin que nous soyons plus secretement [LOUIS XI, Nouv. XCVIII]
- XVIe s. .... Car crainte et doubte alors Luy cloent le bec, contemplant les richesses [J. MAROT, V, 266]Mais mieux me vaut rendre ma lettre close [MAROT, II, 23]Clouez tout court, rentrez de bonne sorte : Maistre passé serez certainement En un rondeau [ID., II, 373]En liberté maintenant me pourmaine, Mais en prison pourtant je fus cloué [ID., II, 425]Cela n'eust pu sembler autre chose que battre l'air à clos yeux [CALVIN, 26]Juppiter s'excusoyt, remonstrant que tous ses benefices estoyent distribuez, et que son estat estoyt clouz [RAB., Pant. III, 33]Le soleil levant, il s'espanouit ; soy cachant, il se cloust [ID., ib. III, 50]Clore et plier une lettre [MONT., I, 293]Il ne m'est onques advenu de trouver la bourse de mes amis close [ID., I, 312]Je m'en vais clore ce pas par un verset ancien que.... [ID., I, 336]Tel en camp clos, qu'en une battaille [ID., II, 7]Elle appelle ses filles pour luy clorre les yeulx [ID., II, 41]Le gardans de pouvoir clorre l'œil, en le contraignant par toute voye et tout moyen de veiller et demourer sans dormir [AMYOT, P. Aem. 59]Ilz avoient conspiré entre eulx, que le premier jour que les Romains sortiroient, ilz leur clorroient la porte à la cueue [AMYOT, Marcel. 14]Pour clorre le chemin à ses ennemis... [ID., Sylla, 46]Il se jettoit à clos yeux au danger [ID., Phocion, 8]Quand se vint à la nuict close, que l'on ne voyoit desjà plus goutte [ID., César, 41]Jusques à ce que les ennemis vindrent à monter sur les remparts qui clouoient son camp [ID., ib. 60]Fermant la bouche à la raison, et clouant les yeux à l'imagination du peril [ID., Pomp. 85]Qu'elle tienne son halaine par intervale, en clouant le nez et la bouche [PARÉ, t. II, p. 629]Nous fismes un contract ensemble l'autre jour, Que tu me donnerois mille baisers d'amour, à levres demi-closes [RONS., 810]
ÉTYMOLOGIE
- Berry, clouer ; picard, cloer, cloure ; provenç. claure, clauzer, clure ; anc. catal. cloir ; ital. chiudere ; du latin claudere. L'ancien français disait il clot et il cloe, nous cloons, il clooit ; d'où la confusion qui s'est faite, pour le son, avec clouer.
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
- CLORE. - HIST. XVIe s. Ajoutez : Vray est que la rigueur de l'inquisition les fait tenir [les Espagnols] clos et couverts [peu communicatifs] [GUY COQUILLE, Dialogue sur les causes des misères de la France, Œuvres, éd. de 1666, t. I, p. 259](voy. à CLOS 1, n° 2, un emploi semblable de clos et couvert en des auteurs plus récents).
clore
Fig., Clore la bouche à quelqu'un, L'empêcher de parler, ou le réduire à ne pouvoir répondre.
Clore l'oeil, la paupière, S'endormir. Il avait à peine clos l'oeil que le bruit l'éveilla. Il n'a pu clore l'oeil de toute la nuit.
Il est quelquefois intransitif, avec le sens de Se fermer, être fermé. Cette porte, cette fenêtre ne clôt pas bien.
Employé transitivement, il signifie aussi Enfermer et entourer, environner de haies, de murs, de fossés, etc. Clore un jardin, un parc. Clore un bourg, une ville. Clore de haies, de murailles. Se clore signifie Enfermer sa propriété en l'entourant d'une haie, d'un mur, etc. Un propriétaire a le droit de se clore. Jardin clos de murs. Villa close.
Il signifie encore figurément Arrêter, terminer. Clore une négociation. Clore un inventaire. Clore un marché. Clore un procès- verbal. Clore un rôle, un compte.
Il signifie particulièrement Déclarer terminé. Clore une discussion. Clore le débat dans une assemblée délibérante. Clore l'incident. Clore la session des Chambres.
Le participe passé de ce verbe entre dans un grand nombre d'expressions figurées, À huis clos, Champ clos, Lettre close, Bouche close. Voyez HUIS, CHAMP, LETTRE et BOUCHE.
Un propriétaire est obligé de tenir son locataire clos et couvert, Il est obligé de lui donner, de lui entretenir son logement en bon état de clôture et de couverture. Fig., Se tenir clos et couvert, Se tenir en lieu de sûreté, de peur d'être pris.
Nuit close, Le moment où la nuit devient complète. Nous arrivâmes à nuit close, à la nuit close.
Pâques closes, Le dimanche de Quasimodo où se terminent les fêtes de Pâques.