mordant, ante
MORDANT, ANTE1
(mor-dan, dan-t') adj.1° Qui mord, qui entame.
J'entends crier la dent de la lime mordante [DELILLE, Géorg. I]
Terme de chasse. Bête mordante, nom donné à certaines bêtes qui se défendent avec les dents ; telles que le sanglier, le renard, le blaireau, le loup, la loutre, etc. 2° Fig. Qui a une qualité corrosive. L'eau-forte est mordante. Terme de médecine. Chaleur mordante, chaleur du malade qui semble mordre la main du médecin qui le touche.
3° Fig.
Dont la parole mord en quelque sorte, Dans vos discours chagrins, plus aigre et plus mordant Qu'une femme en furie ou Gautier en plaidant [BOILEAU, Sat. IX]
Ils sont d'ordinaire plus mordants que des avocats, et plus emportés que des jansénistes [VOLT., Œdipe, Lett. au P. Porée.]
Le Grammont dont les mémoires ont été écrits par Antoine Hamilton, son beau-frère, était un roué de première classe, avec beaucoup d'esprit et très mordant [DUCLOS, Œuvr. t. X, p. 234]
Le mordant et ingénieux Lucien, un des meilleurs écrivains et des plus beaux esprits du siècle de Trajan et de Marc-Aurèle [BONNET, Paling. XXI, 4]
Il se dit aussi des choses. . . . Quand Juvénal, de sa mordante plume, Faisait couler des flots de fiel et d'amertume [BOILEAU, Sat. VII]
Juvénal, élevé dans les cris de l'école, Poussa jusqu'à l'excès sa mordante hyperbole [ID., Art p. II]
Le génie déclamateur et mordant de Juvénal [ROLLIN, Hist. anc. liv. XXVe, ch. 1, art. 2, § 3]
Le poëte, qui a la réputation d'avoir eu quelquefois de tristes salaires pour ses vers mordants [LESAGE, Diable boit. ch. 8. dans POUGENS]
On ne peut pas calomnier ; mais la médisance la plus mordante en dédommage [GENLIS, Veillées du château t. III, p. 386, dans POUGENS]
Mme de Montespan, dans tous ses entretiens particuliers avec Louis, lançait les traits les plus mordants sur le caractère de Mme de Maintenon [ID., Mme de Maintenon, t. I, p. 239, dans POUGENS]
4° Qui fait sur l'ouïe une impression forte et comparée à quelque chose qui mord.
Le son de sa voix était net, plein, bien timbré ; une belle voix de basse, étoffée et mordante, qui remplissait l'oreille et sonnait au cœur [J. J. ROUSS., Confess. V]
HISTORIQUE
- XIIe s. Car veez cum li peres chastie sun enfant Par mult dulce parole e par aspre e mordant, E mainte feiz le bat de la verge trenchant [, Th. le mart. 78]
- XIIIe s. ... Se moz i trovés ja mis, Qui semblent mordans ou chenins Encontre les meurs femenins, Que ne m'en voilliés pas blasmer [, la Rose, 15402]
- XVIe s. Je ne me suis pas feinct à leur donner des advis paternels et mordants, et à les pincer là où il leur cuisoit [MONT., III, 377]
Émile Littré's Dictionnaire de la langue française © 1872-1877