VIATIQUE
(vi-a-ti-k') s. m.1° Chez les religieux, l'argent qu'on leur donne pour leur dépense en allant d'un lieu à un autre.
Charlemagne, apprenant la mort d'un évêque, demanda combien il avait légué aux pauvres en mourant : on répondit, deux livres d'argent ; un jeune clerc s'écria : C'est un bien petit viatique pour un aussi long voyage ; le prince, très content de cette réflexion, dit au clerc : Soyez son successeur, mais n'oubliez jamais ce mot [D'ALEMB., Élog. Mass. note 11]
Par extension, argent donné pour un voyage à une personne quelconque.
Je l'aurais gardée très volontiers pendant six mois, et je lui aurais donné un petit viatique pour Paris [VOLT., Lett. d'Argental, 24 nov. 1770]
Il lui remit l'argent destiné pour mon petit viatique [J. J. ROUSS., Conf. II]
Fig. Moyen de parvenir.
Dès ce moment, M. Chevassu visa à la députation, cet indispensable viatique de tout homme qui tient à faire son chemin [CH. DE BERNARD, Un homme sérieux, IV]
2° Fig. Sacrement de l'eucharistie administré aux malades en danger de mort, afin de les disposer à passer de cette vie à l'autre.
Elle [la reine] reçut hier au soir Notre-Seigneur comme viatique ; ce fut la plus magnifique et la plus triste chose du monde [SÉV., Lett. à Pompone, 18 nov. 1664]
Le saint viatique était excepté [lors de l'excommunication de Philippe Auguste], comme le baptême des enfants, de cette privation des choses saintes [VOLT., Dict. phil. Yvetot.]
L'usage des paroisses de Paris est de porter, pendant la semaine sainte, la communion à tous les malades, sans qu'ils soient dans le cas de la recevoir en viatique [DUCLOS, Œuv. t. v, p. 394]
Il a communié en viatique, sans avoir besoin d'être à jeun.
3° Viatique est souvent confondu, mal à propos, avec l'extrême-onction.
On entra à sept heures, et on le [M. Le Tourneux] trouva comme mort ; on ne put que lui donner l'extrême-onction, ne lui jugeant pas assez de connaissance pour le viatique [STE-BEUVE, Port-Royal, 3e édit. t. v, p. 227]
HISTORIQUE
- XVe s.
Chascun qui puet prant, hape et pique, Pour avoir grant estat et aise ; C'est un perilleux viatique : Tout se pert, le monde et l'eglise [E. DESCH., Poésies mss. f° 337]
ÉTYMOLOGIE
- Lat. viaticum, provision de voyage, et aussi viatique (voy. Quicherat, Addenda), de via, voie, chemin. On a là l'exemple de la différence entre un mot calqué sur le latin et un mot remanié à l'origine par la bouche française : viatique et voyage ont exactement la même étymologie.
Émile Littré's Dictionnaire de la langue française © 1872-1877
viatique
VIATIQUE, s. m. [Vi-atike: dern. e muet.] Au propre, il ne se dit que des Religieux. Provision ou argent qu'on done à quelqu'un pour un voyage. "On lui a doné vingt écus pour son viatique. = Au figuré, on apèle viatique, le Sacrement de l'Eucharistie, quand on l'administre aux malades qui sont en danger de mort. — En s'atachant à l'étymologie, on devrait dire, mon viatique, leur viatique, comme a dit Bossuet: "La grace d'avoir leur saint viatique. Cependant l'usage a prévalu de dire absolument: le saint viatique ou le viatique, et de ne point l'unir aux pronoms pôssessifs. "On lui a doné le viatique, il a reçu le saint viatique: comunier en viatique.
Jean-François Féraud's Dictionaire critique de la langue française © 1787-1788