PROTÉGER
(pro-té-jé. La syllabe té garde l'accent aigu partout : je protége, etc. ; mais l'é se prononce ouvert, et l'on dit protège ; le g prend un e devant a et o : protégeant, protégeons) v. a.1° Prendre la défense de quelqu'un, de quelque chose ; prêter secours et appui.
Protéger hautement les vertus malheureuses, C'est le moindre devoir des âmes généreuses [CORN., Sertor. III, 2]
Elle ne se servit plus de son pouvoir que pour protéger la foi catholique [BOSSUET, Reine d'Anglet.]
Mais souvent sur ses vers un auteur intraitable à les protéger tous se croit intéressé [BOILEAU, Art p. I]
Le ciel protége Troie ; et par trop de présages Son courroux nous défend d'en chercher les passages [RAC., Iphig. I, 2]
Et comptez-vous pour rien Dieu qui combat pour nous, Dieu qui de l'orphelin protége l'innocence ? [ID., Ath. I, 2]
Vous dites des bons mots, et moi je fais de mauvais contes ; mais votre imagination doit avoir de l'indulgence pour la mienne, attendu que les grands doivent protéger les petits [VOLT., Mme du Deffant, 7 mars 1764]
Le duc de Lorraine avait en vain tenté de conserver une communication de sa petite armée avec la ville [Vienne assiégée par les Turcs] ; il n'avait pu que protéger la retraite de l'empereur [ID., Ann. Emp. Léopold, 1683]
2° Prendre soin des intérêts, de la fortune d'une personne.
Borné à la société peu nombreuse de ses amis et, par conséquent, de ses égaux, il n'essuya ni la hauteur des hommes puissants ni le triste honneur d'en être protégé [D'ALEMB., Éloges, la Chaussée.]
On est protégé par ses supérieurs, on peut être défendu et soutenu par ses égaux ; on est protégé par les autres, on peut se défendre et se soutenir par soi-même [ID., Synon. Œuv. t. III, p. 300. dans POUGENS]
Il [un acteur] est assez mauvais pour que je le protége [C. DELAV., les Comédiens, II, 9]
Absolument.
Je ne connais ni M. de Solignac ni ses protecteurs ; je fais, par ma nature, fort peu de cas et de qui protége et de qui se laisse protéger [MIRABEAU, Collection, t. v, p. 191]
3° Veiller au maintien, au progrès d'une chose.
On dit défendre une cause, soutenir une entreprise, protéger les sciences et les arts [D'ALEMB., Synon. Œuv. t. III, p. 300]
4° Mettre à l'abri d'une incommodité, d'un danger. Ces arbres nous protégeront de leur ombre.
5° Se protéger,
v. réfl. Être protégé.
Il faut, comme un soldat, qu'un prince ait une épée.... Que son fier palais se protége D'un camp au front étincelant [V. HUGO, Odes, II, 7]
ÉTYMOLOGIE
- Lat. protegere, de pro, et tegere, couvrir (voy. TOIT).
Émile Littré's Dictionnaire de la langue française © 1872-1877